Une page de publicité

 

©RFP/DR
La publicité est aujourd’hui un élément essentiel du fonctionnement de la télévision. Elle est la ressource principale pour les chaînes privées et une source complémentaire mais nécessaire aux chaînes publiques. Toutefois sa mise en place n’était au départ pas si évidente et il n’y a pas si longtemps le débat était passionnel à ce sujet…
La publicité arrivera d’abord sur les écrans télévisées sous forme des « émissions compensées » en 1951. Il s’agit de mettre en avant un produit générique ou une collectivité sans citer de marque. On vente ainsi les mérites du beurre, du sucre ou bien encore des petits pois (on se souviendra notamment des fameux « On a tous besoin d’un petit pois chez soi »).
Le financement de la télévision se fait en grande majorité par la redevance audiovisuelle.
Ce n’est que le 1er octobre 1968 à 19h56 que la publicité de marque arrive véritablement à la télévision et plus précisément sur la 1ère chaîne. C’est l’acteur Jacques Duby qui inaugure cette révolution par une publicité pour la marque de fromage « Boursin ». Ce soir là il y aura 5 publicités de marque et une première règle établie : Pas plus de 2 minutes de publicités par jour (alors qu’aujourd’hui ce n’est pas plus de 6 minutes par heure).

©A2/DR

La Régie Français de Publicité (RFP) est créée l’année suivante pour coordonner ce nouveau type de programme. Elle fixait les tarifs de publicité en fonction de l’audience des différentes chaînes de télévision et mettait en place ces différentes publicité à travers une commission de visionnage composée d’annonceurs, de consommateurs, du BVP (bureau de vérification de la publicité)et d’officiels de la télévision. Elle contrôlait le respect des cahiers des charges (notamment les différentes secteurs interdits de télévision) et pouvait également mettre en place des modifications en fonction du message publicitaire et de la charte déontologique établie. La publicité arrive donc en 1968 sur la première chaîne et en 1971 sur la deuxième chaîne. La troisième chaîne demeurera une chaîne sans publicité jusqu’en 1983.La publicité devient un élément incontournable pour le fonctionnement de la télévision. Ainsi en 1973, soit seulement 4 ans après son introduction, la publicité représente 23% des ressources budgétaires de l’ORTF.

©TF1/DR

Cette présence à l’image peut prendre les aspects d’interlude entre deux programmes à l’image du petit lion néerlandais Loeki qui ouvre et clôture les pages de publicité de TF1 devenant ainsi une des mascottes de la chaîne. Enfin les transitions entre chaque programme ne se fait pas obligatoirement par ce style de coupure et la télévision garde des petits programmes faisant la liaison entre deux émissions à l’image des Tifins (TF1), des animations mettant en scène le A et le 2(Antenne 2) ou bien encore Cocoshaker (FR3).

©La Cinq/DR

Les années 80 seront marquées par de grands bouleversements avec l’arrivée de nouvelles chaînes privées. Tout d’abord, la RFP perd son monopole sur la gestion de la publicité audiovisuelle avec la création de Canal+ puis de La 5 et de TV6 mais elle reste pour le moment la seule entité dans ce domaine pour les chaînes publiques.
Ensuite avec l’arrivée de La 5 se pose la problématique d’une nouvelle utilisation de la publicité. A la différence des chaînes publiques qui perçoivent la redevance audiovisuelle, les chaînes privées ne doivent leur existence que grâce aux revenus publicitaires (à l’exception de Canal+ qui est une chaîne payante). Avec son cahier des charges, La 5 peut couper les films diffusés par de la publicité. Ce qui paraît aujourd’hui tout à fait anodin représentait, à l’époque, un débat où s’enflammaient les passions. Les réalisateurs français sont ainsi monté au créneau mi-décembre 1985 (soit 2 mois avant l’arrivée de la chaîne) pour faire part de leur colère d’un éventuel « saucissonage » de leurs oeuvres. Bertrand Tavernier proclame qu’aucun de leurs films ne pourra passer à l’antenne tandis que Costa Gavras au cours d’un entretien télévisé prends l’exemple des Etats-Unis où les coupures publicités inondent les films. Ainsi une de ses oeuvres durant 2h passe à 3h .
Un journaliste rebondira sur l’émotion créée : Yves Mourousi. Au cours d’une interview avec le Président de la République il lui coupe la parole pour une page de publicité. François Miterrand comprenant sans peine la perche tendue explique que les chaînes publiques ne peuvent justement procéder à ce type de coupure du fait de leur statut.
Dans un premier temps La 5 ne peut effectivement diffuser des films à l’antenne mais très vite un accord sera trouvé et le « saucissonnage»tant redouté aura quand même lieu et aujourd’hui ce débat paraît bien lointain.
Progressivement certains secteurs jusque-là interdits d’antenne peuvent annoncer à la télévision. La dernière grande évolution en date fut le 1er janvier 2007 avec la possibilité pour la grande distribution de faire de la publicité télévisuelle. L’interdiction de certains secteurs s’expliquent pour des raisons de santé publique (le tabac ou l’alcool) tandis que pour d’autres il s’agit de ne pas léser d’autres types de supports médiatiques (comme la presse régionale) ayant besoin également de cette manne.

©FR3/DR

TF1 est privatisée en 1987 et créée ainsi sa propre régie « Tf1 publicité ». La RFP ne s’occupe plus alors que d’Antenne 2 et FR3 qui progressivement mettront en place également leurs propres structures. La RFP finira par être liquidée au début des années 90.
La publicité restera le nerf de la guerre de la plupart des chaînes de télévision et malheur à celle qui n’aura pas l’audience conséquente pour attirer les annonceurs. La 5 en fera d’ailleurs les frais.
Toutefois comment considérer cette course à l’audience pour des chaînes publiques qui perçoivent par ailleurs la redevance audiovisuelle ? C’est ainsi que depuis 1er janvier 2007 le groupe France télévisions renoue avec ce qu’était l’ORTF. Ainsi la publicité de marque n’est plus autorisée à partir de 20h à 6h mais par contre rien n’empêche la communication de messages promotionnelles généralistes à l’image de ce que furent les « émissions compensées ». Le projet d’origine était de supprimer complètement la publicité de marques mais pour le moment il semble que la question soit en suspend.
Deux autres chaînes publiques ont par contre toujours fonctionné sans publicité : Arte et La Chaîne parlementaire permettant ainsi sans doute une contre-programmation que ne pourrait se permettre une chaîne gratuite privée.

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